dimanche 25 août 2019

Grand Capucin : Voie des Suisses, sortie O Sole Mio



"Le Grand Capucin est un monolithe parfait de protogine. 400 mètres d'escalade variée : dalles, fissures, toits, murs à knobs... Tout y est. De plus le panorama est à couper le souffle. Au fur et à mesure que l'on s'élève, le mont Blanc dévoile son versant sud et la mythique arête de Peuterey. Ayant eu la chance de grimper sur de nombreuses parois de granit dans le monde, je trouve que celui de la combe Maudite est le plus beau et plus agréable qui soit. Cette protogine rouge à gros cristaux permet lorsque ce n'est pas trop raide, l'escalade hors des fissures." 
Avouez que cette introduction de Philippe Batoux dans les 100 plus belles du Mont-Blanc, donne sacrément envie.



Ça se complique à la lecture du topo, les voies les plus faciles sont cotées ED. On trouve du 8b dans la plus dure. Et elles sont toutes à équiper sur coinceurs. Bon bah, on va laisser le mythe où il est et ça sera sans moi. 
Mais en fouillant un peu, je tombe sur la combinaison Voie des Suisses, sortie O Sole Mio. On évite ainsi un pas d'artif "athlétique" et on grimpe en libre dans le 6a (chamoniard bien sûr). 300 mètres, TD+ sur coinceurs ça me va mieux.



Là voilà inscrite en bonne place sur ma to do list de grandes voies estivales.
Mi-juillet, la forme est là, Loïc est dispo mais la météo à Cham n'est pas assez bonne pour grimper à 3800 mètres. Ça sera l'occasion de cocher un beau projet à la tour Termier et de découvrir une belle voie abordable récemment rééquipée à Sialouze. Qui a dit qu'il faisait toujours meilleur dans le sud ?



L'été se passe (bien) et le projet du grand Cap s'éloigne. Le couloir des Aiguillettes qui permet d'accéder au pied de la voie est tout sec, la rimaye impraticable.
Jusqu'à lundi dernier, où je tombe sur un compte rendu récent de la voie des Suisses. Les grimpeurs ne mentionnent pas l'approche, c'est que ça n'a pas du leur poser problème. Effectivement, en creusant je découvre qu'on peut rejoindre le pied de la voie par de l'escalade facile en rive gauche du couloir des Aiguillettes. Ça ne nous dit pas comment on va passer la rimaye, mais le hasard s'en chargera.



Le hasard fait bien les choses, la météo est au beau pour ce week-end qu'on avait booké avec Loïc et on croise deux grimpeurs italiens au pied de la face, qui nous racontent dans un mélange d'itaglais qu'ils viennent de bivouaquer sur une vire de 20 cm de large parce qu'ils ont coincé leur rappel à 50 mètres du glacier. Ça met un petit coup de pression d'autant que j'ai justement oublié ma couverture de survie. Avant d'aller se coucher, ils nous expliquent comment rejoindre en deux longueurs la section en rocher facile en rive gauche du couloir. Merci les gars et buona notte !!



On attaque donc au point le plus bas de la face et ça grimpe direct. Heureusement la section suivante pour arriver au pied de la voie passe bien en corde tendue. Ouf', on est enfin à l'attaque !
Plus tôt en saison, c'est bien plus rapide de remonter le couloir en neige, mais l'avantage de la fin de saison, c'est qu'il y a beaucoup moins de monde dans la voie la plus "facile" du grand Capucin. Aujourd'hui, une seule autre cordée partie tôt du refuge est 100 mètres plus haut.



La voie démarre à la limite du rocher orange et du rocher gris. Ce rocher orange, c'est la fameuse protogine dont parle Philippe Batoux. Solide, adhérente et sculptée...
Assez rapidement, ça grimpe dans le 6a mais ça se protège bien et surtout c'est magnifique; fissures, dülfer, dièdre...



La suite est aérienne et nous demande de la détermination. Heureusement quelques câblés coincés facilitent la pose de protection dans le deuxième crux. Y a de l'ambiance, le Trident et la Chandelle paraissent maintenant tout petits.



Et c'est presque surpris et plus ou moins fourbus qu'on arrive au sommet. Check mec, on est au sommet du grand Cap'. Encore une belle croix partagée ensemble !!
La descente en rappel dans Voyage selon Gulliver est l'occasion de quelques égarements et moments de solitude mais on arrive au pied de la face sans coincer la corde.
Ouf' de soulagement et re-Check.


 Le grand Cap', c'est fait. 
Une belle conclusion pour un bel été en montagne.






topo rectifié






mardi 13 août 2019

Granit autour du Pavé.


Quand Pauline et Brice nous proposent un week-end au refuge du Pavé, je pense à l'arête Sud de la Pointe Emma (trop facile), au Pavé dans la mare (trop dur), à la Rébuffat en face sud du Pavé (trop à l'ancienne) et à une cabane de chantier (trop p...) au charme certain...
Mais pas forcément à de belles voies sportives en granit.

Et pourtant, il y a plusieurs lignes qui valent le détour.
Surtout depuis qu'elles ont été rééquipées en 2015 par une équipe de guides du bureau de la Grave. Merci à eux. Comme sa voisine Reine de la Nuit à la Meije, c'étaient devenues des voies peu parcourues car trop engagées et à l'équipement vieillissant.
Alors que la grimpe est belle et le rocher solide.



C'est plaisant de voir que les mentalités évoluent. Pendant que certaines montagnes s’effondrent et que l'on cherche à promouvoir l'alpinisme dans les Ecrins, c'est peut-être une bonne idée que de rééquiper des vieilles voies non protégeables sur coinceurs ?
Qui peut imaginer qu'en 2016, on oblige des ouvreurs à utiliser des pitons plutôt que des goujons sous prétexte qu"une voie nouvelle (à la Meije), n'aura d’intérêt que si elle permet de faire progresser l'alpinisme de haut-niveau." 



Eurydice est un bon projet pour compléter une montée en refuge le matin. L'approche de la cabane de chantier est rapide (45min), son exposition Sud-Est lui garantit du soleil encore une partie de l'après-midi et les cinq rappels efficaces. En 2019, les filles grimpent entre elles et comme on n'a pas été sélectionné au GFHM, on s'encorde ensemble avec Brice.



La voie est assez homogène dans le 6a/6b. Sa hauteur est modeste mais on peut passer un peu de temps dans le 6b de la 3ème longueur. Les quelques pas de traversée en dalle se passant un bon mètre au-dessus du spit. Donc 6b max mais 6b obligatoire...

Malgré le rocher un peu croustillant, c'est une belle voie pour arriver pile à l'heure au dîner.



Dimanche, on va grimper Traffic dans la petite mais belle face Sud-Est du Pic Nord des Cavales.
En bons hédonistes, l'orientation nous permet de grimper au soleil et de mettre le réveil à 7h.



Traffic est plutôt dans le 5c/6a et pour le coup l'équipement est assez abondant dans la longueur en 6b+ pour passer A 0h! Cette fois, les guides ont pensé à leurs vieux jours...



Plus on monte dans la face, plus c'est raide et plus c'est beau.
La voie termine au sommet du Pic Nord des Cavales, l'occasion de me rappeler mes débuts en alpinisme et de faire un selfie avec le glacier carré (ou ce qu'il en reste). 



Alors que le refuge était plein, on était les seuls dans les voies samedi et dimanche. Et comme l'accès est sec, on peut y monter en baskets jusqu'à l'automne.


Topo Eurydice et Traffic





vendredi 9 août 2019

Boucs en stocks à la Tour Termier



Granit ou Calcaire ?
Pourquoi choisir ?
Après un week-end sur le beau granit chamoniard en rive droite de la mer de glace avec Amel, on va grimper sur le meilleur calcaire du quartier à la Tour Termier avec Juan.



Le topo nous décrit "une très belle escalade technique, aérienne et variée avec une sortie superbe. Malgré quelques vires, il y a des longueurs très belles et mémorables (L2, L4 et la sortie sous le sommet de L8)."



Bien d'accord avec le topo, je rajouterai que la voie se prête bien à une cordée hétérogène. Avec au choix: 5C+ 5C 6A 5C ou 6B+ 6B 6A 6A+. Par rapport à sa voisine Feu Sacré, parcourue il y a 3 semaines, les cotations sont plus gentilles.



Bref, un bon plan pour grimper sur du rocher magnifique avec la vue qui va bien.
Et surtout, ne vous levez pas trop tôt, la voie prend le soleil vers 11h-11h30.






mardi 6 août 2019

Du beau granit chamoniard loin de la foule en rive droite de la mer de Glace

"Est-ce que tout le monde a du matériel pour bivouaquer ?
Les jours précédents, c'était bien en conditions mais là avec la neige, vous devrez peut-être mettre les crampons dans les cheminées rouges. Et c'est pas plus mal, un peu de glace là-haut, ça tiendra les blocs...
D'habitude, je fais le petit dej' à minuit et demi mais là, vu les conditions, je vous propose une heure du matin."



Voilà après le dessert, les quelques mots de la gardienne du refuge de Leschaux aux prétendants à l'ascension de l'éperon Walker en face Nord des grandes Jorasses. Ça met dans l'ambiance. Ici, on fait pas dans la dentelle.

Nous, on est plutôt d'accord avec Lyn Hill qui, après une brève expérience de l'alpinisme, a déclaré: "Ce que j'aime, c'est un bon rocher au soleil."



Alors, on laisse les 1200 mètres de l'imposante face Nord pour aller grimper les 300 mètres de la voie Comte-Engelmann à l'aiguille Pierre Joseph (5C max). Louis Laurent, un des auteurs du dernier topo Mont-Blanc Granite, rencontré au refuge nous l'a conseillée.



C'est vrai qu'il y a des beaux passages mais on l'a trouvée un peu trop hétérogène et peut-être trop végétale à notre goût. Et pourtant d'habitude, je me méfie des voies historiques...



Par contre, chose rare à Cham, on n'a vu personne de la journée. Ni dans la voie, ni dans celles d'à coté, ni sur le sentier, nulle part en fait.
Alors que le secteur a l'air de regorger de belles voies intéressantes. Le seul inconvénient est son orientation Sud-Ouest. Donc à l'ombre jusqu'en fin de matinée. Problème qui peut-être résolu par une grasse matinée et une deuxième nuit à Leschaux ou au Couvercle.



On a choisi l'option refuge du Couvercle pour pouvoir grimper une face Est le dimanche et pas louper le train du Montenvers.



Il y a aussi dans ce 3ème tome du topo, une voie Piola décrite aux Pinacles du Moine, le dièdre des gentianes pourpres (TD+ 180 mètres).
Quand on aperçoit la pointe, la ligne de fissure s'impose sur toute la face.
Tout ce qui nous a manqué hier était rassemblé aujourd'hui. Des grandes longueurs homogènes, de l'ambiance, la pureté du granit. Pas de végétation, ni une vire dans la voie. Même les relais étaient pendus.


 
Autant hier, il y a avait pas mal de pitons dans la voie, autant aujourd'hui, le double jeu de friend a bien servi. Avec 4 spits (hors relais) dans toute la voie et pas un vieux friend coincé (qui te remonte le moral), fallait pas faiblir...

Quant aux cotations, on a pu apprécier la différence avec les 6a de la Contamine aux Pointes Lachenal. Cette voie continue et magnifique se mérite, ça grimpe de l'attaque au sommet. Et à part les 20 derniers mètres, ça ne déroule jamais.



Comme vous l'avez compris, c'était dur (pour nous) mais qu'est ce que c'était beau et qu'est ce qu'on était content d'arriver au sommet !!
Même 30 ans après l'ouverture, les voies Piola ne se démodent pas. Et comme hier, personne dans le secteur.

Topo voie Comte et Dièdre des gentianes pourpres