Les montagnards aiment bien les listes.
Chacun a sa petite liste de projets pour l'été, Rébuffat a ses 100 plus belles, l'ENSA la fameuse pour aller au proba, et moi, la liste des choses à ne pas faire.
Avec Amel, on a une liste bien à nous. La liste des ascensions qu'on n'a pas faites pour cause d'enchaînements trop ambitieux.
Après Squatteurs de Lune, Nabot Léon et une mauvaise nuit sous tente au plan de l'Aiguille, on abandonne les Lépidoptères pour aller se baigner au lac à Passy.
La traversée des Courtes, après le Whymper, ça faisait beaucoup...
Le Piège avant Grépon-Mer de Glace ? Et si on gardait des forces pour demain ?
Une autre fois pour cause de bouchons au téléphérique, on grimpe la Rébuffat à la décalée et quand on plante la tente à 23h sur le glacier, forcément on n'est pas frais le lendemain pour la Contamine.
Dans cette liste, parfois le projet a été abandonné au réveil ou après l'approche. De temps en temps en haut de la première longueur. C'est le cas pour la Contamine avec qui on avait une revanche à prendre. L'avantage, c'est qu'on sait où est l'attaque...
Et on sait aussi que la première longueur attaque dur. 5b sur le papier mais déjà obligé de coincer pieds et mains dans une fissure raide.
L2, premiers égarements, ça passe à droite ou à gauche ?
Les deux passent, je prends à gauche. Perdu, c'était à droite.
L3, ça se complique. Au départ d'une grosse vire, il y a au moins 4 itinéraires par des fissures différentes et le topo n'est pas très clair. Après 20 mètres difficiles, je me demande si je suis au bon endroit. Au dessus, ça a pas l'air facile et le guide autrichien qui était derrière nous passe dans une ligne plus à gauche avec quelques pitons. La présence d'un spit m'encourage à la réchappe.
L4, après consultation du topo, on n'est plus dans la voie mais dans Harold et Maud.
Pas grave, ce 5c de 40 mètres en fissure est magnifique.
L4 bis, c'est là que ça se complique. On est 10 mètres à droite de la Contamine et ça a l'air ardu pour la rejoindre. Deux spits, puis plus rien. Trop dur pour moi en libre, c'est le moment de ressortir mes vieilles notions artifs. Un cablé moyen, un micro-friend qui ne tient pas longtemps et c'est la chute avec déboutonnage... Heureusement, il y avait les spits...
Après une remontée sur corde envoyée par les anglais qui sont au bon relais, on rejoint la voie, ouf' et thank you guys...
L5 et L6 sont sur le papier les deux longueurs dures (6a+). Alors que la longueur clé d'Harold et Maud avait l'air costaud, le crux de la Contamine passe crème et nous a semblé même surcoté par rapport à la première longueur.
L7, 4b enfin une longueur qui déroule. Les protections s'espacent, on peut (enfin) avancer.
L8, 4b mais rien avoir avec la précédente, ça grimpe à nouveau. C'est au tour de nos collègues anglais de se fourvoyer. Je tire une grande longueur de 55 mètres, car avec tous ces rebondissements, l'heure tourne. Nous voilà au sommet, bien heureux mais aussi bien secoués par cette journée pleine de rebondissements. Un bisous rapide et on enquille les rappels. Ceux qui connaissent la remontée à l'Aiguille en fin de journée savent comme un peu de marge horaire permet de ne pas se mettre dans le mal.
En serrant les fesses, les rappels se passent bien, jusqu'au dernier où notre bout de corde reste coincé au relais [insultes censurées]. Pas l'énergie de regrimper une longueur et demi, ni l'envie de louper la benne et de se payer la demi pension aux Cosmiques (2/3 du prix d'un brin par personne). On abandonne lâchement la moitié de notre corde (presque neuve) avec notre numéro de téléphone en espérant que l'esprit montagne existe encore even in Chamonix...
topo amélioré